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Mandore ou Mandolino ?

Ses origines

L'histoire et l'évolution des instruments à cordes frottées ou pincées est très complexe. Elle n'est pas linéaire dans le temps, mais le résultat de fusions entre différentes cultures et différentes techniques de fabrication. La technique de jeu des musiciens se perfectionnant, le nombre de cordes a constamment évolué.
Il en résulte qu'une même appellation a désigné des instruments de factures différentes, de nombres de cordes différents, ou d'accord différents. Inversement des instruments semblables ont eu en Europe des noms différents.
L'appellation de l'instrument qui est présenté dans cette page fait particulièrement l'objet de controverses. Des informations diverses sont données. Cette page n'a aucune prétention d'expliquer rigoureusement ses origines ni même de trancher sur son nom. Au contraire je cherche plutôt avec un certain amusement à cultiver l'ambigüité.
Cet instrument se nomme sans trop de contestation Mandolino ou Mandoline Lombarde ou encore Mandoline Milanaise Toutefois, sous la foi des informations reportées ci-dessous, le nom de Mandore peut lui être attribué.


La Mandore est quelquefois présentée comme une évolution intermédiaire entre le luth et la mandoline.
En fait, comme l'explique fort bien le site du groupe Gabriele Leone, la mandore remplace la guiterne médiévale qui avait également une tessiture aigue. Elle serait née en France, venue de Navarre à la fin du XVIième siècle. Au début du XVIIième siècle, elle a été adoptée en Italie en pleine période baroque. L'accord a évolué et le nombre de cordes a augmenté, pour atteindre 6 choeurs.

La page du site du groupe Gabriele Leone explique avec une agréable précision l'histoire de la mandoline, en passant par celle de la mandore. Histoire de la mandoline


Des sources d'informations parmi les plus riches résident à la Cité de la Musique de Paris, principalement dans sa médiathèque.
Voici quelques liens aux pages répondant au mot clé "mandore":
Ces deux premiers instruments, mis à part le nombre de cordes et l'arrangement du cheviller, ressemblent à s'y méprendre au luth.
Le premier imprime déjà le style de l'Italie du nord avec la "tête de marteau". Luth Mandora 16 siecle / Venise Celui-ci pourrait être un luth. Allemagne 17° Cette mandore italienne du 17ième siècle préfigure déjà la forme de la mandore. Italie 17° Le cheviller de ce modèle français est fermé à l'arrière. Il une tête sculptée qui n'est pas "en marteau". Cette forme semble bien être spécifiquement italienne. France 18° La forme de la mandore se précise. Celle-ci a 3 cordes doubles + 1 corde simple. Italie 18° Première Mandore à 6 cordes double ( de la médiathèque ) Europe 18° Les 6 cordes doubles, la tête de marteau se confirment.
Le cheviller est fermé, et la rosace est rapportée, taillée dans un bois sombre. Italie 18° Avec ces deux Mandores de Giovanni Smorsone à Rome, nous trouvons une forme et des propotions tout à fait harmonieuses. Giovanni Smorsone Rome 1729 Giovanni Smorsone Rome 1730 Cette autre, signée de Giacomo Triolli, datant de la même époque confirme la forme, la recherche de décoration riche et d'une rosace particulièrement travaillée. Italie 1769 Celle ci présente une rosace ( = une rose ) en parchemin, comme il était d'usage pour les guitares baroques. Montpellier 1766 J'ai eu le coup de coeur pour cette mandore signée Giovani Giuseppe Fontanelli fabriquée à Bilogne en 1772. En pariculier la tête de mateau, le manche dont la touche est superbement décorée, et la rose directement sculptée dans la table. La forme du corps est un peu large. Giovani Giuseppe Fontanelli 1772 Celle ci confirme la mandore du 18ième siècle. Italie 18ième siècle

La Mandorone Italie 16ième siècle La Mandorone a un cheviller plat avec des chevilles verticales. La caisse est très bombée. Les cordes sont fixées directement au bas de la caisse sans cordier. La table forme un angle en bas du chevalet. Ces caractéristiques préfigurent la Mandoline napolitaine ainsi que la Mandoline génoise, avec un nombre de cordes important. Mandorone Italie 18ième siècle Mandorone / Naple / 1790 La question qui tue:
quelle différence entre un mandoline et une mandore ?

Voici une mandoline datée de 1652 fabriquée à Venise. Mandoline Venise / 1652
Pour entretenir le trouble, voici côte à côte une mandore et une mandoline Milanaise fabriquées par le même luthier: Giovani Giuseppe Fontanelli. Sur les vues de côté, une échelle est rapportée pour comparer les dimensions. Les photos proviennent de la médiathèque de la Cité de la Musique.

mandore

mandoline

mandore

mandoline

mandore

mandoline



Image de tête de ce bloc:
La joueuse accorde une mandoline à 6x2 cordes. Il s'agit d'une Mandoline Milanaise ou d'une Mandore. La belle joueuse de mandoline

Une petite grimace, c'est la seule adressée au site "www.instrumentsmedievaux.org": le paragraphe consacré à la mandore est un peu court, et l'illustration laisse rêveur. Enfin, pardonné: ce n'est pas un instrument médiéval. Mandore ??

Médiathèque

de la mandore à la mandoline Lombarde

La Mandore comme les mandolines lombardes ou milanaises ont été très répandues en Italie comme en France. Malgré tout, assez peu de pièces leur ont été consacrées. Quelques compositeurs célèbres s'y sont attachés, mais on trouve très peu d'enregistrements dédiés à la mandoline baroque. Les concertos comme ceux de Vivaldi, necessitent un son puissant, impliquant un jeu au plectre et de mandolines napolitaines à cordes métalliques. Des oeuvres de solo de mandoline baroque avec jeu aux doigts comme le luth ou la guitare sont presque introuvables. C'est pourquoi il faut rendre hommage encore une fois au groupe Gabriele Leone qui ont publié un disque consacré à la mandoline à travers les siècles.
On peut le trouver ici cherchez la référence MM2015: Cinq siècles de Mandolines Nicola Swinburne Présente également ses services: www.mandolinserenade.com Ce luthier mérite d'être cité: lutes-strings Egalement ce groupe: arte mandoline

Mes références

La description

L'instrument présenté en tête de ce bloc est une mandoline Lombarde, appelée aussi mandoline Milanaise, ou encore mandoline baroque comme elle est désignée maintenant dans les ensembles musicaux qui l'utilisent. Toutefois, comme l'ambiguité subsiste, je nomme quelquefois mon instrument sous le nom de Mandore ou plus définitivement de Mandolino .

    Un Mandolino peut se définir par ces caractéristiques:

    Caisse richement ornée

  • Un développement qui s'est fixé surtout au nord de l'Italie, de Venise à Milan, en période baroque durant laquelle tout bel objet se devait d'être richement décoré.
  • La caisse est arrondie. Elle est formée de lamelles de bois nommées côtes taillées en fuseau et cintrées à chaud. Le bois est de l'érable (bois clair éventuellement teinté) ou du palissandre (bois marron-rouge joliment veiné), en ébène ou bois de serpent. Le côtes de bois foncé sont quelquefois alternées avec des filets d'ivoire.

    tete de marteau

  • Le cheviller est légèrement courbé, il se termine en "tête de marteau". Cette tête plate est souvent ornée de nacre. Il est ouvert à l'arrière, contrairement à celui des violons et des luths. Il comprend 12 chevilles. Il est souvent orné de filets d'ivoire.
  • Le manche est court et étroit. La touche est toujours ornée richement d'ivoire, d'écaille de tortue et de nacre. Le dos du manche est lui-même décoré, quelquefois en incrustation d'ivoire ou de nacre.
  • Le manche est fretté par des anneaux de boyaux. Le diapason (longueur des cordes) est d'environ 32cm ce qui le situe dans le registre des mandolines.
  • La table, en épicéa clair, est plate. Elle est solidement barrée ( barres internes d'épicea collées à l'arrière de la table) pour supporter la traction des cordes et pour amplifier les sons aigus en évitant à la table de les amortir par trop de souplesse.
  • La table est ornée d'une rosace directement et finement sculptée dans sa masse.

    Une jolie rose

  • Les six choeurs de cordes accordés à l'unisson sont accrochées à un chevalet collé à la table. Elles sont en boyaux ou boyaux filés de cuivre ou d'argent pour les plus basses. Comme pour le luth, les cordes modernes en nylon sont plutôt plus performantes. Elles sont assez rapprochées devant un manche plutôt étroit. Les mains de forgerons n'y seraient pas à l'aise. Les cordes sont pincées avec les doigts contrairement aux mandolines napolitaine (et peut-être milanaise) qui sont jouées au plectre.


Mon Mandolino

Mes références

Plan de Makoto Tzuruta

Un grand merci à Makoto Tzuruta
Sans son site Crane Je ne me serais jamais lancé dans l'aventure, ni même peut-être dans la fabrication des autres instruments. Sa rubrique "fabrication d'un luth pas à pas", est tellement illustrée en photos qu'on n'a pas trop de mal à se passer des commentaires qui sont ... en japonais...
Lute making step by step
( Hélas la traduction par google ne semble plus fonctionner) Dans mon reportage je ne donne pas trop de détails sur les différentes étapes de la fabrication de ma mandore. Ce serait faire injure à "mon maître" Makoto Tzuruta qui a publié tous ces détails et que j'ai suivi à la lettre.
En revanche, j'ai pris quelques photos pour expliquer ma marqueterie. C'était pour moi une première, alors l'indulgence est la bienvenue...

Mandore de Makoto Tzuruta


Les matériaux
J'ai hésité à réaliser la caisse en bois clair avec des filets foncé, comme celle de Makoto Tzuruta, ou bien l'inverse: bois foncé avec des filets clairs, comme celles de Giovani Giuseppe Fontanelli (voir plus haut). J'ai opté pour une solution prudente en abandonnant les filets entre-côtes (tiens c'est drôle) pour me décider en faveur d'une caisse en côtes alternées.
Les bois choisis sont du palissandre et de l'érable. Le manche et la tête sont également en érable. la touche est en palissandre incrustée d'érable. Cherchant à m'inspirer des modèles italiens, je voulais aller un peu plus loin dans la décoration. J'ai trouvé dans une foire vide-greniers une brosse en ivoire. J'ai pu la découper en filets et en petites plaquettes. Une cheville de violon en ébène que j'avais en surplus, m'a permis de réaliser de petites plaquettes qui, alternées avec celles en ivoire entourent la touche.

J'ai décoré l'arrière du manche en bandes de palissandre et d'érable, prolongeant les côtes, comme cela se faisait assez couramment en Italie.

Le bois provient de chez Bernard Kauffer, déjà cité.

Je peux recommander ces deux fournisseurs:
Fer à cintrer chez Luthimate Luthimate
Cordes et accessoires Le Point d'Accroche

L'atelier

La scie à chantourner et le fer à cintrer

Les côtes doivent être fixée en tête par une pièce en bois cônique. J'ai choisi un bloc de noyer.Mais j'avoue que pour l'usage il était un peu dur. Pour le découper j'ai utilisé ma scie à chantournerdont j'ai incliné la table à 45°. J'ai collé deux gabarits sur les deux faces pour me servir de guide,puis j'ai façonné 13 facettes pour que les côtes puissent être collées sur une surface à peu près plane.Les côtes ont été montées une par une, comme le montre la photo du site crane.
Pour le façonnage du manche, la difficulté a été de maintenir solidement l'instrument.Impossible de le fixer dans un étau, et puis il fallait protéger les côtes. En plus l'érable était particulièrement dur.J'ai confectionné un bloc de maintien dans lequel l'instrument pouvait s'encastrer. Ce n'était pas top,mais je m'en suis sorti malgré tout.
Pour confectionner la touche en marqueterie bicolore, j'ai utilisé la technique de découpage cônique. Le principe est de coller légèrement les deux plaques de couleurs différentes, la plaque destinée à la couleur à encastrer est au dessus. La table de la scie est inclinée d'environ 5°. On colle dessus le paquet le dessin de la découpe. La découpe se fait en suivant le bord extérieur du dessin, comme le montre le schéma ci dessus. Après découpe on sépare les deux plaques avec une fine lame de cutter. La découpe en "V" permet la compensation de l'épaisseur de la lame de scie. La partie claire s'encastre parfaitement dans la partie sombre.
Pour réaliser le dessin j'ai travaillé l'image du modèle de Fontanelli sur ordinateur, pour supprimer les couleurs et exagérer les bords. Puis j'ai dimensionné le dessin pour qu'il soit imprimable à l'échelle convenable.
Le cadre de marquetterie est un filet d'ivoire encastré dans le palissandre. J'ai ajouté par la suite un bord confectionnéde plaquettes d'ivoire, de bois rouge teinté et d'ébène.
Toujours en suivant la méthode "Crane", j'ai découpé le cheviller à la scie à chantoutner, en suivant une copie du planque j'avais collé sur la pièce. Auparavant, j'avais percé les 12 trous de chevilles à la mini perceuse verticale,car après sciage, on n'a plus de plan de référence pour un perçage parfaitement perpendiculaire.
J'ai hésité pour le choix de la couleur du cheviller. J'ai utilisé la photo de montage provisoire ci dessus pour réaliserune simulation sur ordinateur. J'ai opté pour une couleur palissandre. J'ai pu obtenir cette couleur à l'aide de mélange deteintures marron, jaune et rouge.
La découpe du chevalet en palissandre a été faite d'abord à la scie à chantourner, puis une finition à la mini gougeet au canife. Un travail amusant. Ma Dremel sur colone verticale a bien été utile pour le perçage des 12 trous d'attache des cordes.
A propos du chevalet, celui-ci a une surface de collage assez faible. Il doit retenir 12 cordes tendues à 2,2kg environ, cela faitplus de 25 kg de traction. Comme le palissandre du chevalet est lisse et presque 'gras' le collage n'a pas tenu le coup.Un beau soir un bruit affreux: le chevalet s'est décollé. Une des "moustache" avait cassé. Le vernis un peu abimé autour.Mais bon, c'aurait pu être pire. J'ai effectué plusieurs traits de canif au dos du chevalet pour mieux faire tenir la colle.Puis, une fois collé en position, j'ai percé trois trous pour enfoncer 3 chevilles. N'ayant pas pu décoller la plaque d'ivoiresans risque de la casser, j'ai confectionné trois petits triangles pour masquer les chevilles. Comme une moustache était cassée,j'ai transformé des deux avec de petites pointes d'ivoire.



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